Valeur technique d’une offre d’un marché public

valeur technique

Qu’est-ce que la valeur technique d’une offre ?

La valeur technique d’une offre d’un marché public est un des critères d’attribution décisif pour la notation des offres. Elle s’appuie sur l’offre économiquement la plus avantageuse. Selon l’article R2152-7 du code de la commande publique elle est jugée notamment au travers du mémoire technique.

Le pouvoir adjudicateur peut se fonder sur une pluralité de critères non discriminatoires liés à l’objet du marché qui peuvent faire l’objet d’une méthode de notation.

Attention à la spécifité des mémoires techniques

Le contenu du mémoire technique dépend UNIQUEMENT :

  • des exigences du dossier des consultation,
  • et en aucun cas d’un modèle ou d’un exemple.

Il en résulte qu’il ne faut pas transmettre un mémoire technique trop général et donc insuffisamment précis et spécifique au regard des besoins du marché (Jurisprudence du Tribunal administratif de Paris).

A titre indicatif il peut décrire notamment les moyens humains et matériels affectés à l’exécution du marché, les modalités d’exécution proposées par l’entreprise et les dispositions qu’elle prévoit pour garantir la qualité des prestations à réaliser et le respect des délais d’exécution. Ces éléments étant ici fournis à titre d’exemple uniquement.

ATTENTION chaque dossier étant différent les exigences correspondant aux besoins sont obligatoirement spécifiques, donc il est fortement déconseillé d’utiliser un plan type.
L’utilisation d’un document générique s’effectue à vos risques et périls (dégradation de votre note technique). Voir jurisprudence précitée sur cette pratique et les risques encourus.

Formation MEMOIRE TECHNIQUE

Cadre juridique

Article R2152-7 du code de la commande publique [Critères d’attribution et offre économiquement la plus avantageuse]

Pour attribuer le marché au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l’offre économiquement la plus avantageuse, l’acheteur se fonde :
1° Soit sur un critère unique qui peut être :
a) Le prix, à condition que le marché ait pour seul objet l’achat de services ou de fournitures standardisés dont la qualité est insusceptible de variation d’un opérateur économique à l’autre ;
b) Le coût, déterminé selon une approche globale qui peut être fondée sur le coût du cycle de vie défini à l’article R. 2152-9 ;
2° Soit sur une pluralité de critères non-discriminatoires et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution, parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux. Il peut s’agir des critères suivants :
a) La qualité, y compris la valeur technique et les caractéristiques esthétiques ou fonctionnelles, l’accessibilité, l’apprentissage, la diversité, les conditions de production et de commercialisation, la garantie de la rémunération équitable des producteurs, le caractère innovant, les performances en matière de protection de l’environnement, de développement des approvisionnements directs de produits de l’agriculture, d’insertion professionnelle des publics en difficulté, la biodiversité, le bien-être animal ;
b) Les délais d’exécution, les conditions de livraison, le service après-vente et l’assistance technique, la sécurité des approvisionnements, l’interopérabilité et les caractéristiques opérationnelles ;
c) L’organisation, les qualifications et l’expérience du personnel assigné à l’exécution du marché lorsque la qualité du personnel assigné peut avoir une influence significative sur le niveau d’exécution du marché.
D’autres critères peuvent être pris en compte s’ils sont justifiés par l’objet du marché ou ses conditions d’exécution.
Les critères d’attribution retenus doivent pouvoir être appliqués tant aux variantes qu’aux offres de base.

Quels sont les principaux critères d’évaluation d’un marché public ?

La valeur technique de l’offre, est le principal critère d’évaluation, elle est jugée essentiellement sur le mémoire technique ou sur l’offre technique, d’où son importance croissante.

Son contenu varie d’un dossier de réponse à un autre et peut-être décomposée en sous-critères, elle peut comprendre des éléments tels que :

  • Les moyens humains affectés au marché (nombre, fonctions, qualifications, compétences, CV, …). Il s’agit ici des qualifications et l’expérience du personnel assigné à l’exécution du marché public lorsque la qualité du personnel assigné peut avoir une influence significative sur le niveau d’exécution du marché public.
  • Les moyens matériels ou techniques (véhicules, outillage, …)
  • L’organisation mise en oeuvre par l’entreprise pour répondre aux besoins
  • La méthodologie pour réaliser les travaux ou prestations (Etapes, contenu, engagements, moyens affectés, …)
  • La démarche qualité (SOPAQ – Schéma Organisationnel d’un Plan Assurance Qualité, normes, …)
  • Le planning envisagé pour respecter les délais d’exécution
  • Les mesures mises en oeuvre en matière de santé, d’hygiène et de sécurité
  • La démarche sociétale et environnementale (insertion, gestion des déchets, gestion des nuisances, recyclage des déchets, SOGED – Schéma d’Organisation et de Gestion des Déchets, …).

Règles à respecter et jurisprudence

Mémoire technique par l’acheteur et dénaturation de l’offre

TA Cergy-Pontoise, 9 mars 2020, n° 2001861, Sté Endros. Analyse du mémoire technique par l’acheteur et dénaturation de l’offre d’un soumissionnaire. « Le règlement de consultation comportait également un sous-critère technique « dispositif mis en place pour les interventions sur amiante ».

Le maitre d’ouvrage a relevé que l’offre ne comportait « Aucune mention » s’agissant du traitement et du suivi des déchets amiantés.

Or il ressort des mémoires techniques analysés que des éléments de gestion des « déchets amiantés étaient mentionnés à au moins deux reprises ».

Ainsi, nonobstant la circonstance que les éléments exposés par la société requérante « aient été succincts et peu précis », le maitre d’ouvrage « n’en a tenu aucun compte alors même qu’elle avait relevé l’existence de mentions peu claires sur ce sujet dans l’offre d’une société concurrente ».

Le juge en déduit que l’acheteur a dénaturé l’offre de la société et a ainsi méconnu le principe fondamental d’égalité de traitement des candidats à l’attribution d’un marché public ».

Méthode de notation des offres et auto-évaluation des critères

CE, 22 novembre 2019 n° 418460, société Autocars Faure. Une méthode de notation des offres ne peut reposer sur une auto-évaluation des critères de jugement des offres.

Une méthode de notation des offres par laquelle le pouvoir adjudicateur laisse aux candidats le soin de fixer, pour l’un des critères ou sous-critères, la note qu’ils estiment devoir leur être attribuée est, par elle-même, de nature à priver de portée utile le critère ou sous-critère en cause si cette note ne peut donner lieu à vérification au stade de l’analyse des offres, quand bien même les documents de la consultation prévoiraient que le candidat attributaire qui ne respecterait pas, lors de l’exécution du marché, les engagements que cette note entend traduire pourrait, de ce fait, se voir infliger des pénalités.

Sous-critère relatif au montant des pénalités de retard

CE, 9 novembre 2018, n° 413533, Société Savoie Frères. Un sous-critère relatif au montant des pénalités de retard dans l’exécution des prestations, qui n’a ni pour objet ni pour effet de différencier les offres au regard du délai d’exécution des travaux, ne permet pas de mesurer la capacité technique des entreprises à respecter des délais d’exécution du marché ni d’évaluer la qualité technique de leur offre.

En outre, la personne publique n’est pas tenue de faire application des pénalités de retard et le juge administratif, peut modérer ou augmenter les pénalités résultant du contrat si elles atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire.

Par suite, ce sous-critère est sans lien avec la valeur technique de l’offre à apprécier. L’acheteur public peut-il utiliser un sous-critère de choix des offres relatif au montant des pénalités de retard ?

Trame de la décomposition du prix et valeur technique

CAA Nantes, 6 juillet 2017, n° 16NT01702, Société EERI. La trame de la décomposition du prix doit être respectée de manière à rendre possible la comparaison des offres.

Les critères de jugement des offres et leurs modalités d’application doivent être suffisamment précis, notamment en ce qui concerne les éléments demandés dans le mémoire technique utilisé pour le critère de la valeur technique de l’offre, pour ne pas laisser à l’acheteur une liberté de choix discrétionnaire susceptible de méconnaître les principes d’égalité des candidats et de transparence des procédures.

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la SARL EERI a, dans le bordereau de décomposition des prix joint à son offre, modifié, en méconnaissance des dispositions de l’article 1.7.3 du cahier des clauses techniques particulières propre au lot n°16, les sous-lignes relatives aux installations de chantier (2.1), aux canalisations (3.4), aux petits appareillages (3.5), aux appareils d’éclairage (3.6), à l’éclairage de sécurité (3.7), à l’onduleur (3.8), aux chemins de câbles (4.1), au portique antivol et platine (4.8), et à la sonorisation (4.9) ; que la société requérante, en outre, n’a pas renseigné le prix de certains des postes figurant dans le bordereau de décomposition des prix, préférant les inclure dans d’autres ; que ces modifications conséquentes ont rendu impossible la comparaison de son offre avec celles des sept autres candidats ; que la société Le Teuff, titulaire du marché et qui a obtenu la note de 3/3 à ce sous-critère, a scrupuleusement respecté la trame de la décomposition du prix global et forfaitaire pour présenter son offre ; que, par suite, la société requérante n’est pas fondée à soutenir que la note de 0/3 qui lui a été attribuée au titre du sous-critère  » présentation des offres  » serait entachée d’une erreur manifeste d’appréciation« ).

Simulation par un détail quantitatif estimatif (DQE) relatif à des chantiers fictifs

CE, 16 novembre 2016, n° 401660, Sté SNEF et Ville de Marseille (Méthode de notation des offres et utilisation par le pouvoir adjudicateur d’une simulation par un détail quantitatif estimatif (DQE) relatif à des chantiers fictifs).

Exigence de la production de justificatifs

CE, 22 juillet 2016, n° 396597, Communauté d’agglomération du Centre Littoral et autres. Examen des critères d’attribution d’un marché public.  permettant au pouvoir adjudicateur de vérifier l’exactitude des informations données par les candidats (CE, 9 novembre 2015, n° 392785, Société Autocars de l’Ile de Beauté).

Toutefois l’acheteur n’est pas tenu de demander des justificatifs aux candidats dès lors que le règlement de la consultation n’en fait pas une exigence particulière sanctionnée par le système d’évaluation des offres.

Critère d’attribution qui n’est pas assorti d’exigences permettant un contrôle

CJUE, 4 décembre 2003, EVN AG c/ République d’Autriche, aff. C-448/01, point 52 (« un critère d’attribution qui n’est pas assorti d’exigences permettant un contrôle effectif de l’exactitude des informations fournies est contraire aux principes de droit communautaire« ).

Contrôle du juge sur l’attribution des notes par la CAO dont la valeur technique

CAA de DOUAI, 2 juin 2016, n° 14DA00525, société EGB d’Eu. Le juge administratif contrôle l’attribution des notes par la Commission d’Appel d’Offres et notamment l’application des critères de choix des offres.

La CAO commet une erreur manifeste d’appréciation en attribuant une même note au critère de la valeur technique de l’offre alors qu’elle a fait une mise en oeuvre erronée de la méthode de notation.

Dans le cas d’espèce la commission n’a pas procédé à « un examen réel et détaillé » des documents et notamment à la comparaison des mémoires techniques des sociétés concurrentes.

Solution alternative imposée qui n’est ni une option, ni une variante

CE, 21 octobre 2015, n° 391311, SA Test. Un acheteur public peut imposer une solution alternative qui n’est ni une option, ni une variante.

Ainsi une proposition de saisie des données sur support numérique, solution alternative à une saisie sur support papier, exigée des candidats n’était ni une option, ni une variante dès lors que le règlement de la consultation prévoyait pour le jugement des propositions une seule et même liste de critères applicable à l’ensemble des solutions figurant dans les offres des candidats.

Caractéristique technique déterminée et obligation d’exiger la production de justificatifs

CE, 9 novembre 2015, n° 392785, Société Autocars de l’Ile de Beauté. Critère d’attribution d’un marché public au regard d’une caractéristique technique déterminée et obligation d’exiger la production de justificatifs.

Lorsque, pour fixer un critère d’attribution d’un marché public, le pouvoir adjudicateur prévoit que la valeur des offres sera examinée au regard d’une caractéristique technique déterminée, il lui incombe d’exiger la production de justificatifs lui permettant de vérifier l’exactitude des informations données par les candidats.

Pas d’obligation d’informer les candidats de la méthode de notation des offres

CE, 3 novembre 2014, n° 373362, Commune de Belleville-sur-Loire. Le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en oeuvre de chacun des critères de sélection des offres qu’il a définis et rendus publics.

Il n’est en revanche pas tenu d’informer les candidats de la méthode de notation des offres.

Par contre ces méthodes de notation ne doivent pas être de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération.

Validité d’un critère d’attribution des offres relatif aux moyens en personnel et en matériel affectés

CE, 11 mars 2013, n° 364706, AP-HP. Légalité d’un critère d’attribution des offres relatif aux moyens en personnel et en matériel affectés par le candidat à l’exécution des prestations.

Illégalité d’un sous-critère « présentation de l’entreprise », simple présentation générale de l’entreprise, sans rapport avec l’exécution technique du marché, relatif à la capacité professionnelle et technique des candidats et se rapportant ainsi à la sélection des candidatures).

Indications suffisantes sur les attentes au regard des critères de choix

CAA Douai, 19 avril 2012, n° 11DA00142, Hôpital local de Saint-Valery-sur-Somme. L’acheteur doit fournir des indications suffisantes sur ses attentes au regard des critères de choix des offres.

Mémoire technique généraliste ou stéréotypé ?

CE, 8 février 2010, n° 314075, Commune de la Rochelle, Publié au recueil Lebon (Mémoire technique généraliste ou stéréotypé ?).

Rapidité d’intervention en matière de maintenance etsous-critère

Conseil d’État, 1 avril 2009, n° 321752, Ministre de l’Ecologie. Un pouvoir adjudicateur ne peut faire de la rapidité d’intervention en matière de maintenance un sous-critère de l’appréciation de la valeur technique des offres, dès lors que ce sous-critère affecté d’un coefficient de pondération substantiel n’est pas prévu dans les documents de la consultation.